Suisse Avenir

Le dogme politique ruine l’économie française

Le Temps.ch

vendredi 06 décembre 2013


L'invité

Par Arnaud Pineau-Valencienne*

L’impopularité de François Hollande bat des records. L’économie va mal. Et si la monnaie n’était pas l’euro mais le franc, elle aurait dévalué. Le dogmatisme politique donne à la France le label du pays le plus taxé, le moins attractif pour entreprendre. Quelle piste envisager?

* Consultant

Le mandat solennel du président de la République, élu du suffrage universel, lui donne l’autorité nécessaire pour impulser les transformations dont le pays a besoin. Pourquoi, dix-huit mois après son élection incontestable, souffre-t-il d’une impopularité jamais vue?

Les attitudes fausses de la campagne occultent les problèmes et les débats de projets par un slogan: «Tous contre un (le président sortant) et un contre tous», unité de façade des contraires pour séduire les mécontents divers et multiples des temps de crise et détourner la Nation de l’effort à accomplir. Ce choix est à l’inverse de celui fait par Madame Merkel pour son pays. Elle a aujourd’hui le sentiment du devoir accompli, obtient la reconnaissance du peuple allemand et entreprend l’unité nationale.

Les promesses de campagne gonflent la dette publique, sous le label du «changement», alors que la dette de l’Etat est déjà vertigineuse. L’impôt est choisi comme nouvelle source de revenus plutôt que de réduire la dépense publique. Une position de principe qui «donne à leurs auteurs toutes les apparences de l’action généreuse alors qu’ils organisent la misère et la ruine», expliquait en son temps Jacques Rueff.

Les accords préélectoraux entre des partis que tout oppose sauf leur objectif immédiat de «l’homme à abattre» ont pour conséquence l’octroi de postes gouvernementaux distribués non plus en fonction des compétences, mais d’un savant dosage doctrinal contre nature. Cela rappelle la IVe République et annonce la tempête.

Tout juste le gouvernement constitué, plusieurs ministres donnent de la voix, chantant «un credo» qui n’a plus cours en Europe depuis des décennies, mais que le chef de l’Etat laisse s’amplifier, ne disant pas mot il consent! Plusieurs chefs d’entreprises européennes et mondiales lancent poliment l’alerte aux comportements dangereux…

Le président, loin de rechercher un consensus d’unité nationale, une fois élu, veut marquer sa différence. Son acharnement incompréhensible à détruire l’œuvre de son prédécesseur, là même où celui-ci avait réussi des transformations utiles. «Travailler plus pour gagner plus.» Comme si la vérité d’aujourd’hui se devait d’annuler celle d’hier.

La démocratie française accorderait-elle aux élus le «vice impuni» de bafouer les mesures utiles déjà prises, dès lors qu’elles sont portées au crédit d’une autre majorité?

Les bouleversements sociaux, voulus au sommet de l’Etat et fraîchement inscrits dans la loi, visent à éloigner la République des courants spirituels et la France de ses origines au sein de la chrétienté. On élimine les représentants des communautés religieuses et spirituelles du comité d’éthique. Reviendrait-on aux guerres de Vendée? Alexandre Soljenitsyne, Prix Nobel de la paix et victime du goulag, disait aux Vendéens en 1993: «Heureusement vous avez eu Thermidor!»

L’économie se détériore plus que chez nos voisins, l’inflation est communément définie par ses effets et non par ses causes: «La perte du pouvoir d’achat de la monnaie qui se traduit par une augmentation générale et durable des prix» laisse place aujourd’hui au langage de la compétitivité, monnaie unique oblige.

La France a de nos jours un problème de compétitivité, et le chômage atteint un taux exorbitant! Les économistes ne cachent plus que l’euro est une monnaie surévaluée pour le pays. Ce qui signifie que, si notre monnaie était restée le franc, nous aurions dévalué…

Jean-Claude Trichet rappelait, de la présidence de la BCE, que les pays qui maîtrisent leurs coûts maîtrisent mieux le chômage, l’Allemagne, l’Autriche, la Suisse et d’autres au nord de l’Europe le démontrent tous les jours.

La vraie définition de l’inflation est celle de Jacques Rueff: «L’inflation, c’est subventionner des projets qui ne rapportent rien avec de l’argent qui n’existe pas.» Nous sommes au cœur de ce qu’il appelle aussi «les turpitudes des interventions de l’Etat»... Triste record du gouvernement, «… qui donne à leurs auteurs toutes les apparences de l’action généreuse».

A la lumière de la doctrine de Jacques Rueff, la grande majorité des mesures prises par la gauche en France depuis 1981 ne résiste pas à l’analyse, les 35 heures comprises. En y regardant de près, elles imposent au pays des dépenses annuelles à caractère répétitif et cumulatif à l’intérieur des budgets successifs. Le phénomène gonfle mécaniquement le déficit. Il s’est développé pendant les deux septennats du président Mitterrand, créant une dérive incontrôlable et l’amplification.

La droite n’a pas mis en évidence ce processus inéluctable, et la gauche ne semble pas avoir compris ses propres responsabilités dans la crise actuelle, elle persiste et signe dans l’erreur.

Les entreprises qui tirent leur épingle du jeu sont allées chercher la croissance là où elle se trouve dans le monde. Jamais les subventions ne résoudront les problèmes des exploitations en perte, ce en quoi trop de politiciens (ou politiciennes) croient encore.

Le dogmatisme politique donne, à la France, le label du pays le plus taxé, le moins attractif pour entreprendre. Tout le monde sait que la création de richesse au sein de la Nation vient de l’entreprise, avec la part de risque qu’assume l’entrepreneur.

Le premier ministre britannique, en déroulant le tapis rouge à nos entrepreneurs, ne plaisante pas. Il invite chez lui de ses vœux la création de richesse et offre les conditions propices aux créateurs.

Depuis 23 siècles, la pensée d’Aristote vaut aussi pour les dirigeants: «L’ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit.»

Puisse la France se ressaisir, permettre aux entreprises de se développer et à la République de rester ce que le général de Gaulle voulait qu’elle demeure: «La souveraineté du peuple, l’appel de la liberté, l’espérance de la justice»!



10/12/2013
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