Suisse Avenir

L’UE ne veut pas de solutions bricolées

Letemps.ch

mardi 18 février 2014

 

Par Ram Etwareea Bruxelles

 

Bilatérales

Après le oui du 9 février, l’UE refuse des solutions bricolées José Manuel Barroso dit aux Suisses qu’il y a un prix à payer pour le vote du 9 février. La Suisse fait l’objet de quatre «sanctions». Le secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, Yves Rossier, est attendu à Bruxelles ce jeudi

«Il ne s’agit ni de mesures de rétorsion, ni de punitions, mais de conséquences directes des résultats du vote suisse le 9 février sur l’initiative «Contre l’immigration de masse.» Au lendemain de la décision de l’Union européenne (UE) de suspendre les négociations sur la participation suisse au programme de recherche Ho­rizon 2020 et à celui de formation Erasmus+, le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a convoqué la presse suisse lundi pour mettre les points sur les i. «Ne faisons pas comme si de rien n’était. Ça ne peut pas être business as usual», a-t-il affirmé à plusieurs reprises.

La semaine dernière, l’UE avait déjà pris deux autres mesures: le gel des négociations en vue d’un accord Suisse-UE sur l’électricité et la suspension des débats sur un mandat pour négocier un nouvel accord institutionnel.

«Nous ne voulons pas de solution intermédiaire, de solution provisoire, et surtout pas de bri­colage, a martelé le président de la Commission. La balle est dans le camp suisse. Il ne faut pas que les Suisses se trompent eux-mêmes.» Il a rappelé que, quelle que soit la stratégie qui sera adoptée par Berne, elle aura des conséquences sur l’ensemble des relations bilatérales. «Y compris sur les Accords de Schengen, a-t-il prévenu. L’introduction des contingents implique des contrôles aux frontières.» Le chef de l’exécutif européen a dit espérer que ce ne serait pas le scénario du pire qui se matérialiserait en fin de compte du vote du 9 février.

En somme, José Manuel Barroso n’a dit rien de nouveau depuis la semaine dernière. Mais tel un avertissement lancé avant la visite du secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, Yves Rossier, ce jeudi à Bruxelles, il a répété, avec toute la fermeté nécessaire, que la libre circulation des travailleurs et des personnes était un principe fondateur de l’UE et non négociable. Pour l’occasion, il a brandi l’article 13 de l’accord avec la Suisse, qui stipule noir sur blanc qu’«aucune des parties n’imposera des restrictions à la libre circulation des personnes». «Il est inimaginable qu’une banque genevoise vienne s’installer dans un Etat européen et qu’on lui interdise de ramener ses collabo­rateurs suisses, a-t-il donné en exemple. De la même façon, une entreprise française ne s’installera pas en Suisse si on lui dit que le quota de travailleurs français est déjà rempli.»

L’extension de la libre circulation à la Croatie – le dernier pays à avoir rejoint la famille européenne le 1er juillet 2013 – par la Suisse n’est pas négociable non plus, selon José Manuel Barroso. «Pouvez-vous imaginer que les Etats européens accordent la libre circulation aux habitants de quelques cantons suisses et érigent des barrières contre les autres? a-t-il demandé. La discrimination à l’intérieur de l’UE est inacceptable.»

José Manuel Barroso, qui ne cache jamais qu’il est un ami de la Suisse, qu’il a vécu et fait ses études à Genève et qu’il s’est fait un point d’honneur de visiter chacun des 26 cantons, s’est dit attristé et déçu par le vote du 9 février. «Je connais bien la sensibilité des Suisses et je respecte son système de démocratie directe, a-t-il poursuivi. Mais je veux aussi que la Suisse honore ses engagements internationaux. C’est elle qui a négocié l’accord avec la Croatie et l’a paraphé. Elle n’a maintenant pas d’autre choix que de le signer. A moins d’assumer les conséquences d’une volte-face.»

Le chef de l’exécutif européen a demandé que la Suisse propose des solutions dans un délai raisonnable. Selon lui, un certain nombre d’Etats européens montrent déjà une certaine impatience. C’est ainsi que, jeudi dernier, ils ont biffé le sujet à l’agenda concernant le mandat de négo­ciation avec la Suisse, prévu pour la réunion du Coreper (Conseil ­européen au niveau des ambassadeurs). Pour José Manuel Barroso, ces Etats ne comprennent pas la logique du vote du 9 février dans la mesure où les Européens ont indéniablement contribué à la prospérité de l’économie suisse. Grâce à leur talent, à leur expérience, mais aussi grâce, dans certains secteurs, comme ceux de l’hôtellerie et de l’industrie, à leurs bas coûts.

José Manuel Barroso s’est montré un brin irrité lundi à la suggestion que le vote suisse ferait tache d’huile lors des prochaines élections européennes. «Faux, a-t-il rétorqué. En Suisse, les régions qui accueillent les étrangers ont voté contre l’initiative, à l’exception du Tessin. En France comme dans d’autres pays, la xénophobie s’exprime là où il y a des étrangers mal intégrés ou qui abusent d’allocations sociales.» José Manuel Barroso a rappelé qu’il y avait eu une levée de boucliers lorsque l’un des pays de l’Union, faisant allusion au Royaume-Uni, avait voulu mettre en cause la libre circulation au sein de l’Union.

Un nouveau vote en Suisse pour court-circuiter l’initiative de l’UDC? Fixer des contingents pour les Européens très élevés afin de les rendre superficiels? José Manuel Barroso a refusé d’entrer en matière. En revanche, il a expliqué que, du point de vue européen, les relations bilatérales, dans leur forme actuelle, ont vécu. «Nos relations sont régies par plus de 120 accords et ce mode de fonctionnement a montré ses insuffisances. C’est pourquoi la Commission a réclamé la négociation d’un accord horizontal. Nous irons de l’avant avec ce projet, mais non sans avoir réglé le problème posé par le oui à l’initiative «Contre l’immigration de masse.»

 



21/02/2014
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